Mathéa

Ecoutez le témoignage de Mathéa
« Qui sont-elles, ces femmes qui ont nourri nos mères ? Celles qu'on appelle mamie, mammò, mamoune, minnà, nonna. Qui sont-elles, ces femmes qui ont nourri nos pères ? Ont-elles pleuré un jour ? Ont-elles aimé ? Ont-elles souffert ? Que cachent-elles sous les replis de leur corps ? Quel secret ? Quel trésor ? »


Le projet de Passate di donne & Encyclies

Passate di donne / Récits de femmes
est un projet que U Svegliu Calvese explore de diverses façons : il s’est agi dans un premier temps de recueillir des récits de femmes de 80 ans et plus, qui avaient donc connu le passage de la 2nde Guerre Mondiale, autrement dit qui avaient connu la fin d’une société agro-pastorale, et les débuts de la modernité. Dans un deuxième temps, à la demande de U Svegliu Calvese, ces souvenirs ont été interprétés et illustrés par la plasticienne Olivia Paroldi, qui a réalisé des estampes collées sur les murs des quartiers où ces récits étaient nés.
 
On en arrive maintenant, à une nouvelle déclinaison de « Passate di donne » : il s’agit du projet « Encyclies », commandé à Lauriane Goyet, auteure, metteuse en scène et comédienne.

Pourquoi ce nom : « Encyclies » ? Voici ce qu’elle en dit : « Encyclies comme des ronds qui se forment à la surface de l’eau dès qu’on y plonge un corps. Encyclies, comme l’écho, la résonnance, la trace de vies passées. »

Lauriane Goyet a organisé des rencontres entre les protagonistes du projet et de nouvelles intervenantes : filles, adolescente et femme entre 9 et 40 ans. Elle a enregistré leurs dialogues, les a commentés, et enserrés dans des capsules sonores, accessibles par un QR-code.
Celui-ci sera posé près des estampes réalisées par Olivia Paroldi, et collées sur les lieux de vie des femmes, porteuses de ces témoignages.

Ainsi, le promeneur pourra avoir accès à ces souvenirs portés par les voix de celles qui les ont vécus. Les souvenirs s’incarneront dans ces voix qui laissent transparaître la joie de transmettre un peu de leur passé.



Intentions de Lauriane Goyet

Quand j'ai découvert le projet Passate di donne par U Svegliu Calvese, dans lequel intervenait la plasticienne Olivia Paroldi, j'ai été très touchée par ces histoires, par ces femmes, ces témoignages et par l'interprétation graphique qui en était faite sur les murs de la ville.
Puis découvrant les interviews menées par Dominique Bianconi et Francesca Calistri auprès de ces dames j'ai été saisie par le temps. Le temps qui s'écoule si vite, ces vies qui se mêlent à d'autres vies comme des cercles en échos, qui se répètent et d'année en année, de vie en vie nous éloignent du souvenir.

Qui étaient-elles, que vivaient-elles ces femmes il y a 60 ans, 70 ans ?
Nous sommes bercés d'histoires d'avant, mais l'avant est de plus en plus près du maintenant et
l'oubli gagne du terrain sur l'avant plus lointain

Comment rendre vie aux souvenirs ?
Comment insuffler du vivant dans une époque qui n'est déjà plus contemporaine ?
Comment faire vivre l'expérience de ces dames à notre époque ?

La rencontre

Créer des rencontres entre ces dames et des enfants, des adolescents, des jeunes adultes
Des instants partagés entre deux personnes, deux mondes, deux histoires
Questionner l'existence
Confronter des époques et des visions
Que chaque rencontre nourrisse les interrogations et les attentes de ces jeunes
Que chaque rencontre réanime le souvenir d'une émotion d'antan
Et que la vie se partage

La première étape de ce projet de mémoire initiée par Dominique Bianconi avait été de rencontrer ces dames
nées avant la seconde guerre mondiale et recueillir leur souvenirs.
Olivia Paroldi avait alors réalisé des estampes et gravures qu'elle avait ensuite affichées sur
les murs de Calvi, reliant ainsi à travers son prisme le passé au présent.

Pour ce deuxième volet de Passate di donne, les échanges apparaitront directement dans la formule restituée sous forme de capsules sonores.
Nous proposerons à des jeunes gens de venir rencontrer ces dames. Nous travaillerons en
amont avec eux afin de faire émerger leurs questionnements face au monde d’aujourd’hui.
Et nous espérons qu'ils trouveront au moment de la rencontre, un écho dans le monde d'hier.

Ces moments de partage seront enregistrés, et ces témoignages, ces échanges seront la
matière première d'Encyclies.

Qui est Lauriane Goyet ?

Lauriane Goyet est auteure, metteure en scène, comédienne.

En 1998, Lauriane Goyet se forme à l’école des Arts du Cirque de Lyon et est lauréate du concours de nouvelles de la ville de Saint-Étienne. Elle poursuit ses recherches d’écriture et se forme à différentes approches du « corps théâtral » à travers le monde (bio-mécanique théâtrale/Meyerhold, Kathakali, Bharatanatyam, Lecoq, Topeng).

En 2004, elle suit, avec Alain André d’Aleph, une formation pour animer des ateliers d’écriture. Elle écrit pour la Compagnie Le Thé à Trois : Avec ou sans et Deus ex machina, et pour la compagnie Teatreuropa : La femme de barbe bleue s’appelait rouge comme Médée. Formatrice à l’Aria, elle participe à la création du DVD Tante Voce, dans la collection Entrer en théâtre, du CNDP.
En 2011, Lauriane Goyet fonde la Compagnie Acrobatica Machina, et elle écrit et met en scène Tempérance, Avant j’étais un dragon, Le Cirque Plouf, L’Acide rougit le chiendent, La Lune des baies mûres, Nous sommes au crépuscule et l’Aube est là.
En 2013, elle est finaliste du prix NIACA (Rencontres méditerranéennes des jeunes auteurs de théâtre). En 2021, Lauriane Goyet est invitée en résidence d’écriture à l’Aria afin de commencer l’écriture de La femme Baobab.

Lauriane Goyet collabore depuis de nombreuses années avec des artistes plasticiens, des compagnies de théâtre et des centres de formation, en tant qu’auteure, metteure en scène et comédienne.




Olivia Paroldi

Olivia Paroldi grave des images sur du linoléum, puis elle colle les estampes ainsi obtenues sur les murs de la ville. « Les émotions humaines liées au passage du temps sont très présentes dans mon travail.» : C’est cette évocation du « passage du temps » que nous lui avons demandé d’interpréter à partir de récits de femmes, de passate di donne : des femmes âgées de 80 ans et plus, témoins d’un passé révolu, nous donnent leur vision des choses, et nous aident à faire le tri des idées ou des valeurs, à jeter ou à conserver.

Qui est Olivia Paroldi ?

Née à Paris en 1981, formée aux arts appliqués et diplômée de l’école Estienne, Olivia Paroldi s’est spécialisée dans la gravure et l’illustration. Des années de pratique en lien avec les métiers du livre lui ont d’abord permis de mettre son talent au service de la transmission et de la pédagogie.
Ses illustrations pour des supports éducatifs et son travail de gravure en relief pour l’apprentissage des jeunes malvoyants l’ont sensibilisée à l’univers de l’enfant et son imaginaire poétique.
Des rencontres et expériences qui ont conforté sa manière profondément humaniste d’être au monde et sa démarche artistique : mettre en lumière les invisibles, pour en dévoiler la beauté, avec pudeur et délicatesse. Prenant son envol comme artiste, Olivia Paroldi a tourné son regard vers l’Autre fragile et vulnérable.
C’est par des séries d’estampes qu’elle va tracer un cheminement créatif qui lui ressemble : son œuvre est empreinte d’une douceur et d’une bienveillance infinies. Depuis une dizaine d’années, elle apporte des éclats précieux dans les rues des villes : ses « estampes urbaines » en collages surgissent comme des moments de grâce pour les promeneurs qui savent ouvrir les yeux. Ce sont des rencontres avec des belles âmes dont l’artiste a dessiné les traits avec la légèreté d’une poésie. Les estampes collées sur les lieux de passage sont aussi discrètes que les invisibles qu’elle représentent. Le vent et la pluie vont faire leur œuvre, révéler les fragments d’une beauté éphémère et précieuse comme la mémoire d’un visage et d’une histoire. La dichromie bleutée de la gravure va s’estomper au fil des jours, tissant un fil entre la présence et l’absence. Le rapport au temps mémoriel qui marque l’œuvre d’Olivia Paroldi tient aussi à cette technique ancestrale qu’elle met au service de questionnements contemporains. Pour l’artiste, qui ne veut pas s’imposer en s’appropriant l’espace public, ces estampes de rues sont de petites vies de papier, une invitation à laisser effleurer nos imaginaires. Et au-delà de l’émotion esthétique singulière qui peut nous transporter lors de la contemplation de ces collages qui racontent une histoire, c’est aussi l’humanisme qui émane du projet artistique qui nous donne à interroger le monde. Différentes séries d’estampes sont venues et des engagements de l’artiste portés vers la protection de l’enfant et l’accueil des vies en marge.



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