Littérature

Salon de littérature Jeunesse

Réconcilier le jeune public avec la lecture : un des objectifs de l'association U Svegliu Calvese qui organise cet évènement dédié à la littérature jeunesse au coeur de la citadelle de Calvi.

A l'origine de ce projet se trouve l'organisation d'un salon de littérature jeunesse, à Calenzana, pour le compte de la Bibliothèque Centrale de Prêt de Corte, émanation du Conseil Général de Haute-Corse.
Après une "délocalisation" sur la côte orientale et le recours à un autre prestataire l'aventure avait pris fin.
Mais au fil du temps, l'envie de reprendre cette activité s'est imposée d'autant plus fortement que les activités menées auprès des écoles ont révélé des besoins tant de la part des enseignants que de la part des élèves.
Cet événement désormais annuel se déroule sur 3 jours. Les enseignants des établissements scolaires partenaires de l'opération y sont étroitement associés.
Accueil d'auteurs insulaires, du continent, et internationaux, présentations des livres, ateliers et animations, signatures d'albums jalonnent le salon qui s’ouvre également au grand public le temps d’une journée.



La 5ème édition du salon de littérature jeunesse À Libru Apertu, aura lieu du jeudi 30 mai au samedi 1er juin 2024.

Les auteurs_trices-illustrateurs_trices invité(e)s :

Maria Jalibert, Henri Meunier, Fleur Oury, Vincent Cuvellier, Florence HinckelBrigitte Brozzu et Dominique Fumaroli.


À u piacè di ritruvà vi in citadella pè issa bella festa di u libru !


DA LEGHJE :
Comment définir la littérature de jeunesse ?


Aujourd’hui, communément on entend par littérature de jeunesse, la littérature destinée à un public identifié comme jeune. Cependant, à y regarder de plus près, cette définition est loin d’être satisfaisante. Avec cette définition qui met l’accent sur le destinataire, la littérature de jeunesse ne se reconnaît pas à un contenu, mais à un type de lecteur « le jeune » et dès lors différentes questions surgissent : doit-on penser le très jeune enfant ou bien l’adolescent ? Quelle serait la limite d’âge au-delà de laquelle cette littérature ne s’adresserait plus au public visé ? Quid du lectorat « adulte » qui pourrait s’en voir « privé » ?... On voit donc que s’en tenir à l’âge pour définir la littérature de jeunesse est finalement un obstacle « car l'expression « lit-térature de jeunesse » ne désigne rien de ce qu'elle est, de ce qu'elle dit, ni même de la forme et du style qu'elle adopte. Elle privilégie le lecteur alors que l'originalité et la spécificité d'une littérature tiennent ordinairement à une esthétique, à une thématique, à une poétique, mais évidemment pas à un certain type de lecteur affiché dès sa désignation. »
Nathalie Prince-La littérature de jeunesse : pour une théorie littéraire – Armand Colin 2015

Le genre et les contenus ne sont pas non plus sans poser questions : on retrouve dans la littérature de jeunesse des livres/objets, des albums avec ou sans texte (est-ce encore de la littérature quand il n’y a pas de texte ?), des bandes dessinées, des romans... avec des contenus qui différent dans le style, les thèmes, les références… Bref, une grande variété de livres (d’ailleurs pas toujours écrits à l’origine pour la jeunesse) qui correspond à l’hétérogénéité du public concerné (les très jeunes enfants qui ne savent pas lire, les lecteurs débutants, les lecteurs confirmés…). On pourrait alors avancer qu’il n’existe pas une littérature de jeunesse mais des littératures de jeunesse, chacune spécifique d’une tranche d'âge. Cette considération s’avère finalement pratique : elle permet aux éditeurs d’organiser leurs collections et aux « consommateurs » de s’y retrouver. On notera que ces « consommateurs » sont paradoxalement souvent les adultes (parents, bibliothécaires, enseignants…) surtout lorsque les véritables destinataires des livres - les enfants - ne maîtrisent pas ou mal la lecture. Il y a là encore une spécificité de la littérature de jeunesse : les adultes sont pour une partie du lectorat de la littérature de jeunesse les médiateurs indispensables et deviennent dès lors également les destinataires de cette littérature. Ce sont souvent les adultes qui, dans les mains des jeunes enfants, mettent les livres qu’eux-mêmes auront choisis, poussés parfois par leurs propres conceptions ou par des prescriptions comme celles qui peuvent émaner du milieu scolaire. S’il s’agit d’orienter les enfants, alors il faut les orienter vers des oeuvres qui feront sens pour eux tout en les laissant être acteurs de la rencontre (ou pas !) avec les livres ; il faut prendre en compte la légitimé de leurs choix tout en leur ouvrant d’autres possibles. On voit donc combien cette question du contenu est primordiale, que ce soit pour l’adulte médiateur qui choisit les livres ou pour l’enfant lui-même avec ses propres critères qui ne sont pas toujours ceux des adultes !

C’est en premier lieu la loi qui pose un cadre quant aux contenus (Loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse interdisant toute publication présentant « sous un jour favorable le banditisme, le mensonge, le vol, la paresse, la lâcheté, la haine, la débauche ou tous les actes qualifiés crimes ou délits de nature à démoraliser l’enfance et la jeunesse.) Le monde de l’édition, en ce qui concerne les contenus des livres pour enfants fixe également des orientations dictées par les capacités intellectuelles et les besoins affectifs des enfants mais également par un champ de références culturelles d’autant plus réduit que l’enfant est jeune.
La structure du récit doit être adaptée avec une cohérence immédiatement accessible. Le jeune lecteur doit pouvoir accéder aux références essentielles à la compréhension et aux messages implicites, ce qui suppose dans le dispositif narratif une complexité qui est pensée en fonction de l’âge des enfants tout comme le sont le style et le vocabulaire. Les livres pour enfants racontent toujours « une histoire » y compris les documentaires dont la narration ou l’illustration en sont porteuses.
Dans les fictions, le récit est focalisé sur un héros à la nature multiple (un enfant, un animal, un groupe…) qui permet l’identification.

« La littérature adressée à l’enfance ne s’est jamais située en dehors de la littérature que lisent les adultes. Elle se porte seulement vers des lecteurs qui n’ont pas les mêmes interrogations sur le sens du monde que leurs parents, qui n’ont pas non plus la même expérience de la langue. En quelque sorte, elle fait la courte échelle aux plus jeunes pour les introduire à l’univers infini des lectures à venir. »
Documents d’application des programmes 2002. Littérature Cycle3

Cette littérature qui sait parler aux enfants et aux jeunes parce qu’elle s’est adaptée au fil du temps dans sa forme et dans ses contenus s’ancre aujourd’hui davantage dans la culture actuelle fortement modifiée par les bouleversements technologiques de ces trente dernières années.
La littérature de jeunesse numérique est en voie d’expansion : le livre sur support numérique est de plus en plus présent et l’offre d’oeuvres dynamiques et interactives s’enrichit progressivement.
Les livres nativement numériques sous-tendent une démarche de lecture différente qui probablement doit faire l’objet d’un enseignement particulier.
Activation d’animations, possibilité de faire des choix, jeux additionnels, sons, musiques etc… des possibilités multiples qui peuvent avoir des répercussions heureuses quant à la motivation à lire.
L’ère numérique change les choses, autant de voies nouvelles à explorer afin d'élargir et de penser autrement les chemins d'accès à la lecture.
Dans ce nouveau contexte, le livre-papier destiné à la jeunesse a su se renouveler : jeux de textures, animations, dispositifs sonores… les maisons d’édition rivalisent d’ingéniosité pour intéresser aux livres-papier les lecteurs, en particulier les plus jeunes.
Les pop-up books, ces livres dont les éléments se déploient en volume ou en mouvement à l’ouverture des pages, sont de plus répandus et représentent près de 10% des livres jeunesse écoulés. En recomposant leur formule éditoriale pour se positionner différemment des livres numériques, les livres-papier dont on prédisait la disparition ont su « résister ».
Les lecteurs, adultes et jeunes, sont aujourd’hui souvent attachés aux deux formats. Le support choisi dépend avant tout de leur situation de lecture et du genre du livre, plus que d’une préférence pour le papier ou le numérique. Pas de concurrence, donc, mais une véritable complémentarité pour le plus grand bonheur de ceux, petits ou grands, qui aiment lire !

© Isabelle Ganon - 2021